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    [Communiqué] Règlement européen sur la déforestation : pour protéger les forêts, protégeons les petit·e∙s producteur∙rice∙s !

    Communiqué de presse de Commerce Équitable France

    Paris, le 09 décembre 2022

     

    Le Parlement européen, le Conseil et la Commission sont parvenus cette semaine à un accord politique provisoire pour interdire l’exportation et l’importation sur le marché européen de produits issus de la déforestation.  Les acteurs du commerce équitable saluent l’ambition de cette mesure qui vise à réduire l’impact des échanges commerciaux et de la consommation de l’UE sur le réchauffement climatique et l’effondrement de la biodiversité. Mais ils appellent les institutions européennes à articuler cette lutte contre la déforestation avec les enjeux de respect des droits humains et l’accès à un revenu décent pour les petit∙e∙s producteur∙rice∙s.

     

     

    Un règlement ambitieux mais lacunaire

     

    Après un an d’intenses négociations, les institutions européennes se sont mises d’accord sur un texte ambitieux en matière de protection des forêts. Les importations de cacao, café, viande bovine, caoutchouc, huile de palme, soja, bois et de certains produits dérivés seront désormais interdites au sein de l’UE, si elles contribuent à la déforestation. 

     

    Le futur règlement fixe des règles strictes en matière de diligence raisonnable pour les entreprises importatrices et exportatrices qui opèrent sur le marché européen. Celles-ci auront l’obligation, sous peine de sanctions, de prouver la traçabilité des matières premières commercialisées en Europe, via des données de géolocalisation des parcelles, afin de prouver que ces dernières ne sont pas issues de terres déboisées après décembre 2020. 

     

    Les acteurs du commerce équitable saluent le niveau d’ambition de cette réglementation qui contribuera à réduire l’opacité des chaînes d’approvisionnement internationales et l’impact des échanges européens sur la déforestation mondiale. Mais ils alertent aussi depuis plusieurs mois sur la nécessité de prendre en compte dans ce règlement la spécificité des chaînes de valeur faisant intervenir une majorité de petit·e·s producteur·rice·s.

     

     

    Sans prix rémunérateurs pour les petit∙e∙s producteur∙rice∙s, pas d’alternatives à la déforestation

     

    Le café et le cacao sont principalement issus du travail de millions de petit∙e∙s producteur∙rice∙s qui ne possèdent que quelques hectares par famille. La baisse tendancielle des cours mondiaux du cacao et du café ces 3 dernières décennies aggrave de manière chronique la pauvreté de ces producteur∙rice∙s.  Alors qu’ils touchent en moyenne moins de 6 % de la valeur d’une tablette de chocolat, en l’absence de mesures de support ciblées, bon nombre d’entre eux ne seront pas en capacité d’investir à court terme dans les dispositifs de traçabilité coûteux imposés par ce nouveau règlement européen.

     

    Les revenus qu’ils tirent de la vente de café ou du cacao ne sont pas non plus suffisants pour investir dans la régénération de leurs plantations vieillissantes. Or, il y a un double enjeu à stabiliser la production dans les aires géographiques actuelles pour lutter contre de nouveaux fronts pionniers de déforestation et à empêcher le développement d’un marché parallèle, où les produits non issus de la déforestation seraient destinés au marché européen tandis que les produits issus de la déforestation continueraient à être écoulés sur des marchés moins regardants.  

     

    Un partage équitable des coûts de mise en conformité entre les acteurs des chaînes d’approvisionnement  et la juste rémunération des producteur∙rice∙s jouent à ce titre  un rôle essentiel dans la mise en place de filières durables, protectrices du climat, de la biodiversité et des droits humains. “ Seul un prix équitable et la garantie de revenus décents peuvent donner aux petit·e∙s producteur·rice∙s les moyens d’investir dans la transition agroécologique et dans la mise en conformité avec les exigences de traçabilité » rappelle Julie Stoll, Déléguée Générale de Commerce Équitable France. 

     

    Alors que certaines dispositions doivent encore être approuvées à un niveau technique dans les semaines à venir, les acteurs du commerce équitable appellent les décideurs politiques européens à maintenir dans le texte final du règlement l’obligation pour les opérateurs économiques de déployer des efforts raisonnables et documentés pour aider les petit·es exploitant·es à se conformer à la réglementation, y compris à travers une rémunération équitable. “Pour aboutir à des résultats tangibles et transformateurs, l’UE ne peut faire l’impasse sur une approche plus systémique qui prenne en compte la réalité économique des producteur·rice∙s et s’attaque ce faisant aux causes profondes de la déforestation” commente Charlotte Vernier, Chargée de plaidoyer au Fair Trade Advocacy Office à Bruxelles.

     

     

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